1) Théories du diffusionnisme Le diffusionnisme est né en réaction à l’évolutionnisme. Ce n’est pas vraiment une théorie, c’est une période qui a démarré dans les années 1880 pour finir dans la seconde moitié du 20e siècle, et qui se caractérise par des préoccupations commune au niveau des méthodes et concepts.
Les trois écoles diffusionnistes vont soutenir que les méthodes culturelles sont apparues par diffusion. Elles affirment donc que les sociétés n’évoluent pas sous l’effet d’un mouvement général unilinéaire ; les sociétés évolueraient par les contacts qu’elles ont entre elles. Pour les diffusionnistes, la majorité des éléments culturels d’une société ont été empruntés à d’autres cultures et proviennent d’un nombre limité de centres de diffusion, ou foyers culturels, en raison de la relative rareté des processus d’invention.
Cette diffusion d’effets culturels se fait soit par des migrations de populations, soit par contacts prolongés de sociétés voisines. C’est une époque qui se caractérise aussi par la prise en compte de l’ethnographie et de la notion de terrain. On va diversifier les techniques de recherche et favoriser le recours à la méthode inductive (aller du particulier au général), fondée sur l’observation directe et la description précise des cultures vivantes. Ici, toutes les cultures sont aussi vieilles les unes que les autres et ne sont pas qu’un stade historique de civilisation.
L’auteur le plus important et le plus célèbre du diffusionnisme sera Franz Boas.
2) Les trois écoles du diffusionnisme a) la tendance américaine Boas est né en Allemagne mais se rattache à cette école. Lors de ses premières études, en terre de Baffin, dirigées par Ratzel qui pensait que c’est l’environnement qui façonne la culture, il s’apercevra que la culture est en fait façonnée par les hommes, et non par le climat ou la nature. Son œuvre immense couvrira divers domaines de l’anthropologie. Tout d’abord, pour l’anthropologie physique il a démontré l’impossibilité de définir un type biologique ou racial par des moyennes. Il critique violemment la notion de race et l’opposition entre primitif et civilisé. Dans le domaine linguistique, il a démontré que la connaissance de la langue vernaculaire (locale) est l’un des éléments essentiels dans la conduite d’une enquête ethnologique. Pour lui, langue et culture jouent dans les différences entre les peuples. Dans le domaine ethnologique, c’est un observateur minutieux de tous les aspects de la vie indigène. Pour lui, il faut observer, décrire, comprendre. Il ne pense pas que le fait de retrouver des coutumes ou des objets identiques en des lieux ou des temps différents puisse permettre de dégager des lois de l’esprit humain (théorie donc tout à fait contraire à la théorie évolutionniste).
Boas est diffusionniste dans la mesure où il reconstitue les contacts pour les périodes récentes et dans des aires géographiques limitées. Mais contrairement à certains diffusionnistes, il ne se lance pas dans des constructions pseudo historiques. Il a tenté de déterminer les processus psychiques qui ont permis à chaque peuple de réaliser une synthèse culturelle originale. Pour lui, chaque culture réalise un équilibre entre coutumes, croyances et mythes lorsqu’elle les emprunte à des peuples voisins. Il faut aussi analyser les expériences individuelles pour déterminer le génie propre à un peuple, connaître et comprendre la vie de l’individu tel qu’il est modelé par la vie sociale.
La théorie de Boas est donc plus un grand anti-évolutionnisme qu’une totale adhésion au diffusionnisme.
On verra aussi Kroeber, qui s’est principalement intéressé à la nature de la culture. Il considère en effet la culture comme une manifestation universelle. L’étude des cultures consiste en une identification des unités de cultures (modèles culturels ou « patterns »), les cultures locales étant des arrangement particuliers de ces unités de culture.
Wissler systématisera les idées diffusionnistes en créant la notion d’aires chronologiques.
Lowie critiquera le finalisme évolutionnisme tout en acceptant l’idée d’évolution, mais attachera une grande importance à la répartition géographique et à l’emprunt. Il sera un diffusionniste modéré, précurseur du structuralisme.
b) l’école austro-allemande C’est Frobenius qui a vulgarisé la théorie de « cercles de culture » : il affirme qu’à partir de grandes aires, des grands complexes culturels ont irradié sur la majeure partie du globe.
Graebner a montré les modalités que pouvait prendre le phénomène de contacts. Pour lui, l’emprunt peut connaître des transformations, en dehors du noyau originel qui reste stable.
Les pères Schmidt et Koppers appartiennent à l’école de Vienne. Ils participeront à la popularisation de la notion de « cercles de culture ». Ils ont étudié la nature et l’ampleur des contacts entre les cultures et ont été parmi les premiers à évoquer les mécanismes de l’acculturation (adaptation des individus à une culture étrangère avec laquelle ils entrent en contact).
c) l’école anglaise Rivers commencera par travailler dans une perspective évolutionniste. Il se convertira au diffusionnisme vers 1910, alors très à la mode. Il sera un hyper-diffusionniste en faisant une reconstitution du passé et des origines des peuples sans écriture à travers un diffusionnisme extrême.
Elliot-Smith et Perry proposeront la théorie pan-égyptienne selon laquelle l’Egypte serait le berceau de toutes les cultures à travers un immense phénomène de diffusion mondiale. Et lorsque la culture égyptienne déclina, les cultures se dégradèrent !
C’est cette attitude hyper-diffusionniste des anthropologues anglais qui contribuera largement à discréditer la théorie diffusionniste.
3) Conclusion Le diffusionnisme n’admet qu’un type de changement : celui qui vient de l’extérieur, puisque tout s’explique par l’emprunt ou la contagion. Il ne prend pas en compte les conditions d’éloignement. Et surtout, il postule que les sociétés sont incapables de se restructurer elles-mêmes, et sous-estime manifestement l’innovation et la créativité humaines.
Le fonctionnalisme naîtra en réaction au diffusionnisme, mais aussi à l’évolutionnisme.